Un bon apprentissage commence avec de bonnes questions

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Soutenir l’apprentissage des élèves dans le 1er stade du processus d’apprentissage fondé sur l’enquête

Les bonnes questions peuvent mener à de formidables découvertes… et tout ce qu’il faut pour commencer, c’est un brin de curiosité. Dans le cadre de l’apprentissage fondé sur l’enquête, les enseignants commencent en aidant les élèves à formuler des questions importantes, pertinentes et qui les intéressent.

De l’optique des enseignants, l’apprentissage fondé sur l’enquête suscite de l’enthousiasme pour plusieurs raisons. C’est une approche facile à mettre en œuvre et il existe des points d’entrée à tous les stades du processus. Le processus se prête bien à un enseignement différencié et mène souvent à des rapprochements à d’autres disciplines. De l’optique des élèves, c’est une approche qui satisfait au besoin d’apprendre et qui permet d’établir une certaine autonomie en tant qu’apprenant.

Comme l’explique André Cyr, spécialiste en éducation physique et santé (ÉPS) (J-3) au Conseil scolaire du district Catholique Centre-sud, « L’enquête fait appel à la motivation des élèves. Nous voulons que nos élèves soient motivés pour les bonnes raisons, que la motivation vienne d’eux-mêmes et non seulement de l’idée de recevoir un prix ou des louanges. Nous voulons qu’ils adorent apprendre. » Et lorsque les questions des élèves font l’objet de leur apprentissage, c’est formidable de voir comment leur curiosité peut entrainer leurs idées vers de nouveaux horizons.

Comment fonctionne l’apprentissage fondé sur l’enquête ?

Dans son ensemble, le processus d’enquête peut être divisé en trois stades. Le premier, qui fera l’objet de cet article, est le lancement. Ce stade est consacré à la formulation de questions efficaces.

À partir de là, les élèves sont encouragés à effectuer des recherches pour recueillir des informations qu’ils organiseront, interprèteront et analyseront (le stade de la Facilitation). En dernier lieu, ils évalueront l’information recueillie, en tireront des conclusions et communiqueront leurs observations, décisions, conclusions, etc. (le stade de la Compréhension).

Ce processus en trois étapes d’apprentissage fondé l’enquête peut être utilisé efficacement pour tous les sujets d’enseignement. Il permet aux élèves d’acquérir des habiletés supérieures de la pensée comme l’analyse, la synthèse, l’évaluation et la réflexion et de devenir plus autonomes en assumant la responsabilité de leur apprentissage, une habileté importante dans cette ère où nous sommes inondés par de l’information.

Pourquoi les questions d’enquête sont-elles un tremplin aussi efficace à l’apprentissage en ÉPS ?

Comme l’explique Joanne Walsh, conseillère d’Ophea en matière du programme-cadre d’ÉPS pour le secondaire, « Nous vivons dans un monde où les connaissances sont très accessibles. L’enquête permet aux élèves de comprendre le contenu et d’y songer de façon critique. » 

Il s’agit d’une approche particulièrement efficace en ÉPS, où l’apprentissage est individuel. « Pour résoudre un problème de mathématique, vous pourriez avoir à recourir une équation particulière, puis à procéder étape par étape, » souligne Mme Walsh. « Cependant, en éducation physique, nous ne suivons pas tous la même démarche ». Par exemple, si les élèves suivent un cours de yoga, il se peut qu’un élève doive élargir sa base de soutien pour maintenir une posture stable et en équilibre, tandis qu’un autre doit abaisser son centre de gravité. Au fur et à mesure qu’ils développent leur savoir-faire physique à leur propre rythme, les questions qu’ils doivent se poser seront différentes selon leur niveau de maitrise d’une habileté particulière et selon ce qu’ils doivent faire pour la suite des choses.

De même, lorsqu’ils explorent des sujets en matière de santé, les élèves commencent avec différents niveaux de compréhension et de connaissances et ils apportent différentes expériences vécues à la classe. Par exemple, lors d’une discussion sur les relations saines, un élève pourrait se poser des questions à savoir si sa relation amoureuse actuelle est saine, tandis qu’un autre pourrait chercher à savoir comment maintenir une amitié qui lui est chère.

En adoptant une approche axée sur l’enquête, un enseignant peut doucement orienter les élèves dans l’exploration d’un même sujet de différentes façons en rencontrant les élèves là où ils en sont rendus dans leur cheminement afin de les aider à formuler leurs propres questions et à s’appuyer sur leurs connaissances antérieures.

Comme l’explique Mme Walsh, « D’une certaine façon, ils deviennent leur propre enseignant ou accompagnateur. » Plutôt que de toujours se faire dire quoi faire par un enseignement direct, les élèves acquièrent graduellement une plus grande autonomie et la capacité à transférer leur questionnement et leurs habiletés à résoudre des problèmes à de nouvelles situations.

Quelles sont les caractéristiques d’une question d’enquête efficace ?

Les questions d’enquête efficaces ont plusieurs caractéristiques en commun. Entre autres, elles doivent être ouvertes, susciter la réflexion et demander aux participants de faire appel à leurs habiletés supérieures de la pensée et, ce qui est le plus important, elles doivent être intéressantes, non pas pour les enseignants, mais pour les élèves. « Les élèves doivent être ouverts à poser et entendre des questions », dit M. Cyr. « Il doit s’agir de quelque chose qu’ils souhaitent connaître et dont ils veulent faire part. Les bonnes questions font rêver les élèves et les font parfois explorer des sujets inattendus ».

Natasha Davez, enseignante de 7e et 8e année à l’école Johnny Therriault, est du même avis. Selon elle, « Une bonne question devrait être suscitée par une curiosité authentique. Et il doit y avoir un rapport personnel. »

Comment les enseignants peuvent-ils aider les élèves à formuler de bonnes questions ?

À l’école où travaille Mme Davey, sur le territoire de la Première Nation d’Aroland, les questions d’enquête sont souvent créées à l’aide d’un cercle de renforcement des connaissances. « Nous utilisons une plume d’aigle comme bâton d’orateur », raconte-t-elle. « De cette façon, nous effectuons un rapprochement entre la culture et l’enquête ». Alors que la plume fait son chemin autour du cercle, l’élève qui l’a en main est invité à exprimer ses idées ou à poser une question, souvent en la formulant en disant « Je me demande… »

« Je trouve que les questions qui commencent par “Je me demande” se développent souvent en des questions d’enquête très efficaces », dit Mme Davey. « C’est une façon pour les élèves de poser librement une question sur un sujet qu’ils ne comprennent pas et ça engendre de formidables discussions ». Les élèves qui ne se sentent pas prêts à parler peuvent tout simplement passer la plume à la personne suivante. « C’est vraiment une bonne approche, car les élèves sont mis au défi dans un espace sécuritaire et à rythme sécurisant », explique Mme Davey.

Entre-temps, dans le gymnase et la salle de classe de Mme Walsh, la majeure partie de son enseignement s’effectue à l’aide d’une approche préconisant le questionnement. « J’ai vraiment délaissé l’enseignement direct qui préconise de dire ou montrer aux élèves comment mieux mettre en œuvre une habileté, » dit-elle. « J’ai tout simplement commencé en posant des questions. Comment pourriez-vous faire cela ? Selon vous, que devez-vous savoir pour mieux le faire ? Qu’est-ce qui vous intéresse en ce qui concerne ce sujet particulier ? »

Maintenant, Mme Walsh fait seulement appel à un enseignement direct lorsqu’il y a des lacunes dans les connaissances des élèves, ou elle l’utilise pour communiquer différents points de vue sur un sujet afin que les élèves puissent choisir celui qui leur apparaît le plus logique.

Elle aide également les élèves à examiner de plus près les questions d’enquête qu’ils ont élaborées selon certains critères. « Je leur dis : “Regardez la question. Pouvez-vous y répondre par oui ou par non ? Si vous effectuiez une recherche sur Internet, pourriez-vous trouver la réponse ? S’ils répondent oui à ces deux questions, nous discutons de la façon dont la question peut être reformulée afin de nécessiter un travail d’investigation plus poussé ».

Les questions d’enquête efficaces promeuvent les habiletés de vie.

Les questions d’enquête efficaces peuvent également favoriser le développement des habiletés de vie, c’est-à-dire les habiletés personnelles, les habiletés interpersonnelles et les habiletés de la pensée critique et créative qui sont intégrées à l’ensemble du programme-cadre.

« À première vue, c’est le rapport aux habiletés de la pensée critique qui est le plus évident », explique Mme Walsh. Lorsqu’ils examinent de l’Information, les élèves apprennent à se demander s’ils sont d’accord avec celle-ci, si cette information représente leur point de vue et s’il s’agit d’information fiable.

La démarche favorise également le développement des habiletés personnelles. « Si les élèves posent des questions, ils établissent déjà leurs objectifs d’apprentissage », explique Mme Davey. Ils apprennent également par la suite à faire le suivi de leur progrès alors que le processus d’enquête se poursuit dans le deuxième stade de l’enquête, la facilitation, et ils développent davantage leurs habiletés personnelles alors qu’ils effectuent des rapprochements entre ce qu’ils apprennent et leur propre vie et qu’ils songent aux choix qu’ils doivent faire pour être en santé.

En dernier lieu, les élèves peaufinent leurs habiletés interpersonnelles alors qu’ils s’exercent à communiquer leur apprentissage au cours du troisième stade, la compréhension, et qu’ils travaillent ensemble tout au long du processus. « Nous vivons dans une communauté mondialisée », explique Mme Walsh. « Il est très important d’apprendre à écouter attentivement et avec un esprit ouvert. Même si les élèves sont en désaccord avec un point de vue, ils doivent savoir comment répondre d’une façon respectueuse qui reconnaît la diversité ».

Les liens interdisciplinaires et l’enseignement différencié se font presque spontanément.

L’une des choses les plus formidables lorsque l’on pose de bonnes questions d’enquête, c’est que cela peut mener les élèves et les enseignants à des sujets inattendus. « C’est interdisciplinaire », souligne Mme Davey.

Au début de l’année scolaire, elle a mis en œuvre une unité sur la sécurité dans le gymnase avec ses élèves. Ils ont commencé par un cercle de renforcement des connaissances sur l’importance des comportements sécuritaires et à partir de la cela, ils ont créé un contrat sur ce qu’ils attendaient de leur cours d’éducation physique.

« Si je leur dis d’agir de façon sécuritaire et de ne pas pousser les autres, ils ne m’écoutent pas, mais s’ils font les rapprochements et qu’ils créent le contrat, je constate sans aucun doute un changement dans leur comportement », dit-elle. Les discussions des élèves ont porté sur les commotions cérébrales, et ils furent en mesure d’établir un lien avec l’un de leurs joueurs de hockey préférés, Sydney Crosby, qui a subi de nombreuses commotions cérébrales ayant requis de longues périodes de convalescence.

Les discussions ont également mené les élèves de Mme Davey à établir des liens interdisciplinaires avec des sujets portant sur la science. « Nous avons beaucoup parlé du cerveau », souligne Mme Davey. « Ça ne fait pas partie du curriculum de la 7e et 8e année, mais les élèves souhaitaient vraiment en apprendre davantage sur le fonctionnement du corps humain ».

Et lorsqu’il est question d’enseignement différencié, les questions d’enquête sont une excellente façon d’aider les élèves à plonger dans le matériel qu’ils se sentent prêts à attaquer.

Avez-vous des questions au sujet de l’apprentissage fondé sur l’enquête ?

La plupart des enseignants utilisent déjà des approches préconisant l’apprentissage fondé sur l’enquête dans leur salle de classe (de façon formelle ou informelle). Cependant, l’habileté de poser de bonnes questions (et d’aider les élèves à le faire) en est une que nous pouvons tous améliorer en le faisant régulièrement et en obtenant du soutien. Heureusement, il existe plusieurs ressources pour vous orienter.

Le programme-cadre est un excellent endroit où commencer. Il contient de nombreux exemples de questions à poser aux élèves et de réponses de ceux-ci qui peuvent servir de point de départ pour l’enquête.

Ophea a aussi créé un guide portant sur l’apprentissage fondé sur l’enquête qui est un guichet unique pour tous ceux qui souhaitent en apprendre davantage sur cette approche pour l’apprentissage. « Il s’agit d’un guide très exhaustif qui n’est pas seulement théorique. La ressource comprend également de nombreux outils comme des exemples de questions, des formulaires d’autoévaluation que l’on peut remplir et imprimer, des exemples de plans d’enquête et bien plus encore », souligne M. Cyr.

De plus, il existe d’autres excellentes ressources sur le sujet, y compris L’apprentissage par l’enquête et Enquête collaborative en Ontario (faisant toutes les deux partie de la Série d’apprentissage professionnel Accroître la capacité M-12 du ministère de l’Éducation) et Natural Curiosity, une ressource en anglais sur l’enquête pour les questions en matière d’environnement publiée par l’OISE.

Les bonnes questions peuvent mener à un apprentissage la vie durant.

En fin de compte, les élèves qui savent comment poser de bonnes questions seront mieux en mesure de chercher pour de bonnes réponses, une habileté essentielle en ce 21e siècle. « Plutôt que d’être des consommateurs d’information, ils doivent mettre en question l’information », dit Mme Walsh.

Et c’est particulièrement important en ÉPS. Comment les élèves peuvent-ils apprendre à établir des objectifs appropriés pour une saine alimentation et pour être actifs physiquement ? Quelles stratégies peuvent-ils utiliser pour naviguer à travers la grande quantité d’information qu’ils ont au bout des doigts ? Comment peuvent-ils faire des choix sains en ce qui concerne leurs relations personnelles ? Ces questions et leurs réponses auront un impact sur la santé et le bien-être des élèves longtemps après qu’ils auront quitté le gymnase et la salle de classe.